Extrait du roman LES CHOIX DE L’AMOUREUX et iconographie
Sur la lame, un jeune homme aux longues boucles blondes est entouré de deux femmes. Bien que son intitulé soit L’AMOUREUX au singulier elle comporte quatre individus, s’ajoute au-dessus du trio, un angelot flèche bandée. On n’a toutefois aucun doute, seul le personnage central est concerné. Qui le vise ou le tiraille de droite et de gauche n’a que peu d’importance.
Il est l’incarnation de l’adolescence et marque la fin du second ternaire. L’enfant Bateleur du premier ternaire avait quitté les girons maternels pour se frotter aux figures paternelles qui l’ont préparé au grand départ avec LE CHARIOT. Même si LE BATELEUR a déjà bien évolué comme le sous-entend le champ labouré de l’arrière-plan, entre ses jambes. L’AMOUREUX n’est pas encore prêt, il hésite.
Il n’en finit pas de s’apprêter pour se décider enfin à prendre son envol. Il n’est qu’à moitié vêtu. Ses membres inférieurs sont nus, il lui manque la moitié de ses protections… ou il est souvent occupé à promener son soc en quelque terre fertile… et n’a pas eu le temps de se rhabiller… Son seul vêtement est une tunique courte à multiples bandes aux couleurs fondamentales des Tarots. Le bleu et le rouge ainsi que le vert et/ou le jaune. On retrouve, dans différentes versions de la lame, ce jeu d’alternance dans le rayon du soleil qui le surplombe et dans lequel s’incrustent le petit amour ailé et son arc.
C’est la première fois, sur la voie des lames qu’un arcane propose plusieurs personnages identifiables, ou au moins avec un profil reconnaissable, et dont les divisions du cadre ouvrent plusieurs perspectives.
L’ange habite le plan supérieur, l’intellect. La décision à prendre se jouera là. Sa représentation n’est pas sans évoquer l’Éros des Grecs ou le Cupidon joufflu des Romains. Au fil du temps, le petit décocheur de flèches a perdu le bandeau qui l’aveugle. La décision doit être prise en toute conscience et ne rien devoir au hasard. L’AMOUREUX a été formé pour l’assumer. L’angelot incarne aussi la première manifestation de l’éthéré, du divin, sur le cheminement du Bateleur.
Le plan inférieur est occupé par les corps des trois personnages et le champ labouré, il est dédié au concret, à la vie, à l’action. Mais pas encore ! Là non plus, L’AMOUREUX n’est pas prêt. Il se tient solidement campé sur ses deux pieds bien écartés et pointant chacun dans une direction opposée. Il est physiquement incapable de démarrer dans un sens comme dans l’autre.
Le côté gauche de la lame, lorsqu’on la regarde symbolise le passé, le passif engrangé, l’introversion. La femme qui s’y trouve de profil est dotée d’une apparence peu gracieuse, rébarbative, austère, dans sa mise comme dans sa coiffure. Elle incarne la maturité ainsi que l’indiquent les feuilles qui la couronnent. L’autre femme, sur la droite, est jeune, avenante, souriante, des fleurs se mêlent à sa blonde chevelure. Elle représente l’avenir, l’actif en devenir, l’extraversion. Incarnation de la féminité, le bleu domine dans sa tenue.
On peut spéculer à l’infini sur les relations entre ces trois figures. Leur gestuelle n’aide pas à les découvrir et au contraire, ouvre à toutes les possibilités.
La femme de gauche retient-elle le jeune homme de sa main sur l’épaule ou le pousse-t-elle vers sa jeune compagne, lui indiquant qu’il est temps pour lui de s’éloigner, de se déployer vers la vie ? La femme de droite l’attire-t-elle vers elle de sa main sur sa poitrine, emprisonnant son cœur ou remercie-t-elle l’autre de le lui transmettre ?
Et lui qui tourne la tête vers la gauche et le corps vers la droite. Il regrette ? Il résiste ? Il quitte la femme mûre avec soulagement ? Inquiétude ? Il se montre reconnaissant, remercie pour cette voie qui s’ouvre ou appréhende de perdre la sécurité qu’offrait cette maturité ?
Leurs complexes et multiples possibilités d’interaction relationnelle ne s’arrêtent pas au plan émotionnel. Elles peuvent s’exercer dans les sphères sociales et professionnelles, dans toutes les phases de l’existence.
La femme de gauche peut s’incarner dans la sagesse de la maturité, dans la sagesse du formateur, du maitre enseignant ou dans la main mise de l’autoritarisme d’un supérieur. Dans l’amour d’une mère, l’amour d’une femme qui craint, pour son fils, son époux, le chant des sirènes ou se montre jalouse de ses autres intérêts. Dans le vice ou la vertu. La femme de droite peut s’incarner dans l’innocence de la jeunesse, dans un avenir plein de promesses, dans la tentation de la chair, dans le chant des sirènes et l’herbe toujours plus verte ailleurs. Dans le vice ou la vertu.
Les choix existentiels de L’AMOUREUX sont multiples et ne sont jamais simples. Il doit prendre le temps de la réflexion avant d’exercer son libre arbitre.
Le graphisme particulier souvent employé dans l’intitulé de la lame veut attirer l’attention sur les risques de ce choix.
L’AMOVREVX – Le VX final nous mène au Diable, d’une composition similaire à trois personnages. Attention ! donc sur le chemin vers le VVX – LE JUGEMENT – où l’on retrouve les quatre entités de L’AMOUREUX. La figure centrale y est là représentée de dos, le choix est derrière lui. Il a parcouru toute la Voie des Lames.
Pour « aider » encore plus, certains illustrateurs ont ajouté des « codes-barres ». C’est la première fois qu’ils apparaissent, mais il y en aura d’autres. Les IIIII et IIIIII de L’AMOUREUX nous conduise à LA FORCE maintenue avec sérénité nécessaire à la maitrise des pulsions animales et celle-ci nous ramènera au Jugement.
L’AMOUREUX symbolise la jeunesse, l’activité potentielle, mais inexploitée, l’hésitation sur le chemin à prendre pour entrer dans l’âge adulte, dans une étape suivante de son existence.
C’est une lame statique. Encore plus que LE BATELEUR à la position similaire, mais dont le haut du corps est actif alors que celui de L’AMOUREUX est coincé dans un grand emmêlement de bras.
C’est une lame neutre pour toutes les dimensions. Polarité – Rythme – Genre. Neutralité qui ouvre à des significations contradictoires et rend très difficile son interprétation isolée.
Elle est associée au signe des Gémeaux, à la planète Mercure, à la séphira Tipheret – beauté et miséricorde, à la lettre hébraïque Vav – crochet et art d’assembler, à la lavande.